LES PATHOLOGIES DE LA GROSSESSE

L'hypertension artérielle, la toxémie gravidique, l'éclampsie




Au cours d'une grossesse habituelle, la tension artérielle a tendance à chuter un peu dans la première moitié et à remonter par la suite.

On parle d'hypertension artérielle dès que la pression artérielle dépasse 14-9. Deux cas de figure se présentent, selon que vous avez de l'hypertension avant la grossesse ou non.

 


L'HYPERTENSION PRÉEXISTANTE À LA GROSSSESSE


L'hypertension a été découverte avant que vous soyez enceinte ou avant la 20ème semaine de grossesse : on parle alors d'hypertension chronique. La grossesse n'est pas responsable. Si vous avez programmé votre grossesse, votre traitement a été adapté pour être compatible avec la grossesse. Si votre tension est bien contrôlée, vous avez toutes les chances de mener une grossesse normale.

 


L'HYPERTENSION GRAVIDIQUE


Lorsqu'elle apparait après 20 semaines de grossesse, l'hypertension est liée à la grossesse. Elle disparait habituellement dans les semaines qui suivent l'accouchement.

 

Si elle s'accompagne de la présence de protéines (albumine) dans les urines, à un taux significatif (protéinurie ou albuminurie > 0,3 g/24 h), on parte de toxémie gravidique ou pré-éclampsie ou dysgravidie ou syndrome vasculo-rénal.

 

Elle se traduite, en plus de l'hypertension et de la protéinurie, par des œdèmes. Elle peut se compliquer pour mettre en jeu autant le pronostic maternel que le pronostic fœtal.

 

La toxémie gravidique est une pathologie spécifique de la grossesse, ne survenant qu'au 3ème trimestre, voire plus rarement à la fin du 2ème trimestre.

 

Elle est liée à un trouble précoce de l'implantation du placenta dont les artères, de calibre insuffisant, ne perfusent pas correctement le placenta avec pour conséquence un défaut d'oxygénation du placeta et de nutrition du fœtus.

 

 

A) Quelles sont les femmes prédisposées ?

celles dont c'est la 1ère grossesse

celles agées de plus de 40 ans ou de moins de 18 ans

en cas de grossesse gémellaire ou plus

les femmes diabétiques, souffrant d'hypertension chronique, de maladies rénales ou rhumatismales

celles qui ont déjà fait une toxémie lors d'une précédente grossesse (le risque de récidive est cependant inférieur à 10%)

 

B) Quelles sont les risques de la toxémie gravidique ?

 
Le développement de complications dépend bien sûr du degré de gravité de l'hypertension. Elles surviennent essentiellement dans les formes non diagnostiquées ou insuffisamment prise en charge. La rapidité du traitement est essentielle.
 
 
Les risques pour la maman :
 

• si les œdèmes sont très importants, cela peut s'accompagner d'une altération du fonctionnement du rein

le Hellp syndrome : il associe une baisse du taux de plaquettes, un anémie et une souffrance du foie

les troubles de la coagulation peuvent favoriser la formation d'hématomes

l'hypertention très sévère et non contrôlée peut générer les mêmes risques qu'en dehors de la grossesse (accident vasculaire cérébral ...)

l'éclampsie : version ultime de la toxémie gravidique, heureusement rarissime, elle survient en cas d'œdème cérébral et se manifeste sous la forme d'une crise convulsive, suivie d'un état comateux.

 

Les risques pour le fœtus :
 

le retard de croissance intra-utérin (RCIU) : le manque chronique d'oxygène peut ralentir la croissance du bébé, voire la stopper

la prématurité : elle est souvent la conséquence de la prise en charge médicale, qui décide de faire naître le bébé, lorsque le traitement médicamenteux ne permet pas de stabiliser la pathologie

l'hématome rétro-placentaire : la formation d'un hématome derrière le placenta, conséquence des troubles maternels de la coagulation, peut mettre en jeu le pronostic fœtal.

 

C) Quel suivi médical ?

 

La vérification de la tension et la recherche de protéines dans les urines font partie des examens systématiques au cours d'une grossesse. Si la tension est élevée, elle est systématiquement reprise un peu plus tard. Si l'hypertension est confirmée, une surveillance est débutée.La recherche de la protéinurie peut se faire immédiatement par une bandelette réactive.

 

Si la recherche est négative, la pose d'un appareil permettant la mesure de la tension sur 24 heures (MAPA) permet de savoir s'il y a lieu de traiter l'hypertension.

 

Si la recherche est positive, on complètera le bilan par des examens plus précis :

♦ Un bilan sanguin et urinaire avec :

• un dosage quantitatif des protéines contenues dans les urines émises sur 24 heures. Cette protéinurie ne doit pas dépasser 0,3 g/24 h

un dosage du taux d'acide urique dans le sang ou uricémie : son élévation est le signe le plus précoce et le plus souvent présent. Il doit être < 360 µmol/l

une numération formule sanguine, à la recherche d'une anémie ou une baisse des plaquettes

un bilan hépatique et une analyse de la coagulation

 

Une échographie fœtale pour surveiller la croissance du bébé, apprécier la quantité de liquide amniotique et mesurer les débits sanguins des artères utérines et ombilicale grâce à l'échographie-doppler.

 

Une surveillance à domicile avec monitoring est débutée à 26 semaines d'aménorrhée ; elle est réalisée par la sage-femme.

 

Les examens seront régulièrement recontrôlés ; la fréquence de ces contrôles dépendra de la sévérité de la pathologie. Des consignes vous seront également données pour une auto-surveillance avec l'analyse des urines par des bandelettes réactives, la prise quotidienne de la tension artérielle, l'appréciation des mouvements actifs fœtaux et la détection des signes d'alerte.

 

 

D) Quels sont les signes d'alerte ?

 

L'existence d'une hypertension artérielle simple doit inciter à une certaine vigilace permettant de réagir rapidement devant des symptômes traduisant une évolution défavorable.

Devant leur apparition et même dans le doute, il faut en faire part à votre médecin ou à la sage-femme.

 

Les œdèmes : ils se manifestent au niveau des membres inférieurs. Il est parfois difficile de rattacher ces œdèmes à la pré-éclampsie dans la mesure où même lors d'une grossesse normale, beaucoup de femmes souffrent d'une insuffisance veineuse qui se manifeste par un gonflement des jambes en fin de journée. En fait, dans la pré-éclampsie, les œdèmes touchent aussi les doigts (doigts boudinés). De plus, ils ne disparaissent pas après un repos allongé mais se déplacent vers les hanches et même le visage (visage boursouflé au matin).

 

Une prise de poids très rapide, conséquence de la rétention d'eau, doit aussi vous allerter

 

Les maux de tête, les troubles de la vision (mouches volantes), les bourdonnements d'oreilles, les nausées ou vomissements qui réapparaissent, la douleur en barre au creux de l'estomac signent une aggravation de la pathologie.

 

 

E) Quels sont les traitements ?

 

ll est indispensable que le traitement médical soit associé à une hygiène de vie correcte. L'un sans l'autre peut conduire à un échec thérapeutique.
 

Le repos est à lui seul un traitement important. Il peut aller de la diminution de l'activité physique et professionnelle obligeant parfois à un arrêt de travail, jusqu'au repos allongé. Lorsque le trajet professionnel est long ou le travail pénible ou stressant, l'arrêt s'impose.

Il faut trouver, dans la mesure du possible, le temps de s'allonger plusieurs fois dans la journée. Il faut en tout cas s'allonger du côté gauche. Cette position améliore notablement la tension mais aussi le flux sanguin de l'artère ombilicale qui transporte les éléments nutritifs nécessaies à la bonne croissance du fœtus.

 

La relaxation peut être un apport intéressant. Son efficacité dépend de l'adhésion de la jeune femme et de la pratique régulière quotidienne.

 

Le contrôle de la prise de poids, l'arrêt complet du tabac et la gestion du stress sont également nécessaires

 

Le traitement anti-hypertenseur n'agit que sur la tension et permet d'éviter les accidents liés à une tension trop élevée, mais en aucun cas ne permet de prévenir la pré-éclampsie et ses complications maternelles et fœtales. On traite en général lorsque la pression artérielle systolique (1er chiffre) dépasse 16 mmHg et/ou lorsque la pression artérielle diastolique (2ème chiffre) dépasse 11 mmHg.

 

Les injections de corticoïdes sont indiquées si vous êtes susceptible d'accoucher prématurément ; elles permettent d'accélérer la maturation des poumons du bébé.

 

Le régime sans sel ne sert à rien : il est temps d'oublier ces conseils de grand-mères ! Le taux de sodium ne joue aucun rôle dans l'hypertension liée à la grossesse et donc à la pré-éclampsie. Il faut manger normalement salé.

 

Le traitement préventif est à base d'aspirine ; il est prescrit à petites doses (en général 100 mg) avant la 14ème et jusqu'à la 34ème semaine d'aménorrhée, chez les femmes ayant des risques de pré-éclampsie, en particulier celles qui ont présenté une hypertension ou un retard de croissance intra-utérin lors d'une précédente grossesse. Il améliore les échanges vasculaires et diminue incontestablement les complications de l'hypertension gravidique.

 

Des études récentes semblent montrer qu'un apport supplémentaire de calcium pourrait avoir un effet préventif sur la pré-éclampsie. Le diagnostic et le traitement de l'hypothyroïdie, même légère, permet également de prévenir le risque de toxémie.

 

 

F) Quels sont les conséquences sur l'accouchement ?


Tout dépend bien sûr de la gravité de la pathologie. Les médecins mettent en balance, pour prendre la décision du moment de la naissance, les risques liés à une éventuelle prématurité pour le bébé et les risques que représente la poursuite de la grossesse.

Dans les formes peu sévères, un déclenchement est souvent réalisé 2 à 3 semaines avant la date du terme. L'hypertension n'empêche pas un accouchement par voie basse ; la pose d'une péridurale est fortement recommandée car elle permet de mieux contrôler l'hypertension pendant l'accouchement.

 

Dans les cas plus graves, la naissance se fera avant terme. Si le bébé peut supporter le travail (tête en bas, poids suffisant, pas de souffrance fœtale) et si l'état de la maman le permet, un accouchement par voie basse pourra être envisagé. Dans le cas contraire, on procèdera à une césarienne.